Poeme D'amour Sms
L'alphabet.
Il gît au fond de quelque armoire,
Ce vieil alphabet tout jauni,
Ma première leçon d'histoire,
Mon premier pas vers l'infini.
Toute la genèse y figure ;
Le lion, l'ours et l'éléphant ;
Du monde la grandeur obscure
Y troublait mon âme d'enfant.
Sur chaque bête un mot énorme
Et d'un sens toujours inconnu,
Posait l'énigme de sa forme
À mon désespoir ingénu.
Ah ! Dans ce long apprentissage
La cause de mes pleurs, c'était
La lettre noire, et non l'image
Où la nature me tentait.
Maintenant j'ai vu la nature
Et ses splendeurs, j'en ai regret :
Je ressens toujours la torture
De la merveille et du secret,
Car il est un mot que j'ignore
Au beau front de ce sphinx écrit,
J'en épelle la lettre encore
Et n'en saurai jamais l'esprit.
Ce vieil alphabet tout jauni,
Ma première leçon d'histoire,
Mon premier pas vers l'infini.
Toute la genèse y figure ;
Le lion, l'ours et l'éléphant ;
Du monde la grandeur obscure
Y troublait mon âme d'enfant.
Sur chaque bête un mot énorme
Et d'un sens toujours inconnu,
Posait l'énigme de sa forme
À mon désespoir ingénu.
Ah ! Dans ce long apprentissage
La cause de mes pleurs, c'était
La lettre noire, et non l'image
Où la nature me tentait.
Maintenant j'ai vu la nature
Et ses splendeurs, j'en ai regret :
Je ressens toujours la torture
De la merveille et du secret,
Car il est un mot que j'ignore
Au beau front de ce sphinx écrit,
J'en épelle la lettre encore
Et n'en saurai jamais l'esprit.
Poeme D'amour Sms
La lutte.
Sonnet.Chaque nuit, tourmenté par un doute nouveau,
Je provoque le sphinx, et j'affirme et je nie...
Plus terrible se dresse aux heures d'insomnie
L'inconnu monstrueux qui hante mon cerveau.
En silence, les yeux grands ouverts, sans flambeau,
Sur le géant je tente une étreinte infinie,
Et dans mon lit étroit, d'où la joie est bannie,
Je lutte sans bouger comme dans un tombeau.
Parfois ma mère vient, lève sur moi sa lampe
Et me dit, en voyant la sueur qui me trempe :
« Souffres-tu, mon enfant ? Pourquoi ne dors-tu pas ?
Je lui réponds, ému de sa bonté chagrine,
Une main sur mon front, l'autre sur ma poitrine :
« Avec Dieu cette nuit, mère, j'ai des combats. »
La lyre et les doigts.
Une muse, immobile et la tête penchée,Ne chantait plus ; la lyre en soupirait d'ennui,
Et, se plaignant aux doigts de n'être plus touchée,
Disait : « Quelle torpeur vous enchaîne aujourd'hui ?
« Je ne puis rien sans vous, réveillez-vous, doigts roses ;
L'air est si lourd, j'ai peine à vous parler tout bas,
Car mes fibres sans vous, comme des lèvres closes,
Amoncellent des voix qui ne s'élèvent pas.
« Abattez-vous sur moi, comme au vol du zéphire
On voit dans les rayons tourbillonner les fleurs ;
Arrachez-moi mon cri comme au lin qu'on déchire,
Ou sur moi, lentement, glissez comme des pleurs.
« Sinon, si par mépris vous me laissez oisive,
Rendez ma double branche au front carré des bœufs ;
De quel autre baiser voulez-vous que je vive
Que du baiser des doigts qui m'ont faite pour eux ? »
« Lyre, que pouvons-nous ? Sommes-nous l'harmonie ?
Est-ce nous le délire ? Est-ce nous la langueur ?
Et ne sentons-nous pas, esclaves du génie,
Tous nos frissons liés par le sommeil du cœur ?
« Il est le dieu, la main subit sa fantaisie :
Parfois il nous trahit sans nous avoir lassés,
Et parfois, sans pitié, sa longue frénésie
Nous agite sanglants dans les sept fils cassés !
« Implore-le toujours, quelques chants que tu veuilles,
Car nous les lui devons, les chants que tu nous dois :
Sans les brises d'été plus de murmure aux feuilles,
Sans les souffles du cœur plus d'éloquence aux doigts ! »
Poeme D'amour Sms
La Malade.
À Alfred Denaut.C'était au milieu de la nuit,
Une longue nuit de décembre ;
Le feu, qui s'éteignait sans bruit,
Rougissait par moments la chambre.
On distinguait des rideaux blancs,
Mais on n'entendait pas d'haleine ;
La veilleuse aux rayons tremblants
Languissait dans la porcelaine.
Et personne, hélas ! ne savait
Que l'enfant fût à l'agonie ;
De lassitude, à son chevet,
Sa mère s'était endormie.
Mais, pour la voir, tout bas, pieds nus,
Entr'ouvrant doucement la porte,
Ses petits frères sont venus...
Déjà la malade était morte.
Ils ont dit : « Est-ce qu'elle dort ?
Ses yeux sont fixes ; de sa bouche
Nul murmure animé ne sort ;
Sa main fait froid quand on la touché.
« Quel grand silence dans le lit !
Pas un pli des draps ne remue ;
L'alcôve effrayante s'emplit
D'une solitude inconnue.
« Notre mère est assise là ;
Elle est tranquille, elle sommeille :
Qu'allons-nous faire ? Laissons-la.
Que Dieu lui-même la réveille ! »
Et, sans regarder derrière eux,
Vite dans leurs lits ils rentrèrent :
Alors, se sentant malheureux,
Avec épouvante ils pleurèrent.
Poeme D'amour Sms
L'Âme.
À Alphonse Thévenin.J'ai dans mon cœur, j'ai sous mon front
Une âme invisible et présente :
Ceux qui doutent la chercheront ;
Je la répands pour qu'on la sente.
Partout scintillent les couleurs,
Mais d'où vient cette force en elles ?
Il existe un bleu dont je meurs,
Parce qu'il est dans les prunelles.
Tous les corps offrent des contours,
Mais d'où vient la forme qui touche ?
Comment fais-tu les grands amours,
Petite ligne de la bouche ?
Partout l'air vibre et rend des sons,
Mais d'où vient le délice intime
Que nous apportent ces frissons
Quand c'est une voix qui l'anime ?
J'ai dans mon cœur, j'ai sous mon front
Une âme invisible et présente :
Ceux qui doutent la chercheront ;
Je la répands pour qu'on la sente.
Poeme D'amour Sms
La Mémoire.
I.Ô Mémoire, qui joins à l'heure
La chaîne des temps révolus,
Je t'admire, étrange demeure
Des formes qui n'existent plus !
En vain tombèrent les grands hommes
Aux fronts pensifs ou belliqueux :
Ils se lèvent quand tu les nommes,
Et nous conversons avec eux ;
Et, si tu permets ce colloque
Avec les plus altiers esprits,
Tu permets aussi qu'on évoque
Les cœurs humbles qu'on a chéris.
Le présent n'est qu'un feu de joie
Qui s'écroule à peine amassé,
Mais tu peux faire qu'il flamboie
Des mille fêtes du passé ;
Le présent n'est qu'un cri d'angoisse
Qui s'éteint à peine poussé,
Mais tu peux faire qu'il s'accroisse
Ce tous les sanglots du passé ;
L'être des morts n'est plus visible,
Mais tu donnes au trépassé
Une vie incompréhensible,
Présent que tu fais d'un passé !
Quelle existence ai-je rendue
À mon père en me souvenant ?
Quelle est donc en moi l'étendue
Où s'agite ce revenant ?
Un sort différent nous sépare :
Comment peux-tu nous réunir,
À travers le mur qui nous barre
Le passé comme l'avenir ?
Qui des deux force la barrière ?
Me rejoint-il, ou vais-je à lui ?
Je ne peux pas vivre en arrière,
Il ne peut revivre aujourd'hui !
II.
Ô souvenir, l'âme renonce,
Effrayée, à te concevoir ;
Mais, jusqu'où ton regard s'enfonce,
Au chaos des ans j'irai voir ;
Parmi les gisantes ruines,
Les bibles au feuillet noirci,
Je m'instruirai des origines,
Des pas que j'ai faits jusqu'ici.
Devant moi la vie inquiète
Marche en levant sa lampe d'or,
Et j'avance en tournant la tête
Le long d'un sombre corridor.
D'où vient cette folle ? où va-t-elle ?
Son tremblant et pâle flambeau
N'éclaire ma route éternelle
Que du berceau vide au tombeau.
Mais j'étais autrefois ! Mon être
Ne peut commencer ni finir.
Ce que j'étais avant de naître,
N'en sais-tu rien, ô souvenir ?
Rassemble bien toutes tes forces
Et demande aux âges confus
Combien j'ai dépouillé d'écorces
Et combien de soleils j'ai vus !
Ah ! tu t'obstines à te taire,
Ton œil rêveur, clos à demi,
Ne suit point par delà la terre
Ma racine dans l'infini.
Cherchant en vain mes destinées,
Mon origine qui me fuit,
De la chaîne de mes années
Je sens les deux bouts dans la nuit.
L'histoire, passante oublieuse,
Ne m'a pas appris d'où je sors,
Et la terre silencieuse
N'a jamais dit où vont les morts.